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lunes, 13 de enero de 2020

Affaire Matzneff, pedófilo : haciendo leña del árbol derrumbado (en francés)


Affaire Matzneff, pedófilo : haciendo leña del árbol derrumbado

Hace un rato he recibido en "Le Monde" del día de hoy el texto que `puede leerse aquí abajo. 

No he leído nada de Matzneff y dudo que lo haga en el futuro, pero, por visto, fue un personaje muy conocido y citado en Francia hasta ayer mismo.

Revisando por notas por si lo hubiera citado en mis trabajos, constato que no lo he hecho, pero, sin embargo, leo que fue él quien redactó el texto que publicó Le Monde el 26 de Enero de 1977, firmado por 60 personalidades, pidiendo clemencia por tres acusados de pedofília y este texto sí que lo he introducido en mis trabajos. Firmaron entre otros Louis Aragon, Roland Barthes, Simone de Beauvoir, Patrice Chéreau, Gilles et Fanny Deleuze, Jean-Pierre Faye, André Glucksmann, Guy Hocquenghem, docteur Bernard Kouchner, Jack Lang, Jean-François Lyotard, Jean-Paul Sartre y Philippe Sollers.
Uno de mis textos al respecto se puede consultar en este mismo blog en https://javierelzo.blogspot.com/2018/11/los-espanoles-y-la-iglesia-catolica.html

El texto que hoy subo a este blog, está firmado por el notable escritor Dominique Fernandez de quien recuerdo haber leído algo, y creo que es francamente bueno. Yo al menos concuerdo con lo que dice y defiende. 
JE

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Affaire Matzneff : tous s’achètent une bonne conscience en attaquant un homme à terre

Dominique Fernandez
(« Le Monde » 14/01/20)

Oui, Gabriel Matzneff s’est livré à « des abus criminels que rien ne peut justifier », mais gardons-nous de juger les œuvres du passé en fonction des critères moraux d’aujourd’hui, prévient l’écrivain Dominique Fernandez

Les agissements passés de Gabriel Matzneff sont certainement à réprouver. Je ne prends pas ici la défense de la pédophilie, moralement condamnable, légalement punissable. Rien ne peut justifier des abus criminels.

Je prends la défense d’un homme aujourd’hui seul, traqué, malmené, conspué, honni, traîné dans la boue, naguère et encore tout récemment loué, honoré de prix, bénéficiant de bourses d’écriture, pour les mêmes livres qui le font mettre actuellement au pilori ; et cela, sans qu’aucune faute nouvelle de sa part soit venue s’ajouter à son dossier ou aggraver les charges qui pèsent sur lui. Depuis plus de quarante ans, tout le monde était au courant de ses mœurs, dont il ne se cachait pas, puisqu’il en faisait lui-même l’étalage ; et voici que, tout d’un coup, avec une unanimité hypocrite, s’élèvent des clameurs d’indignation.

Le ministre de l’inculture a été un des premiers à jeter l’anathème et à préconiser des mesures vexatoires. [le ministre de la culture, Franck Riester, s’est dit favorable à l’arrêt de l’allocation publique annuelle versée à Gabriel Matzne par le Centre national du livre]  Se prend-il pour le procureur impérial Ernest Pinard, qui dénonçait Flaubert et Baudelaire
Madame Bovary Les Fleurs du mal ? [tous deux poursuivis pour les propos jugés licencieux dans et ]  Sommes-nous revenus au temps de Napoléon III ? Avons-nous besoin, pour défendre nos intérêts, d’un ministre des bonnes mœurs ? Tout homme de culture digne de ce nom se doit désormais de récuser un tel représentant.

Une romancière courageusement féministe, Marie Darrieussecq, pousse un cri de triomphe dans Le Journal de Dimanche en proclamant que cette affaire va mettre un terme à la domination masculine sur les femmes. Ce coup de trompette est déplacé, car ladite domination s’exerce aussi bien sur des garçons que sur des fillettes. C’est la domination de l’adulte sur l’enfant qui est en cause, et la fameuse question du consentement.

De toutes parts des voix se joignent à l’hallali. Les premiers défenseurs de Matzne se rétractent, ses amis le lâchent un à un. Tous s’achètent une bonne conscience en attaquant un homme à terre. Ceux qui l’avaient encensé en parfaite connaissance de sa vie privée se drapent maintenant dans une vertu opportuniste. Son principal éditeur, Antoine Gallimard, vient de donner le coup de grâce, en annonçant qu’il retire son journal de la vente, ce qui signifie pour un auteur la mort professionnelle, le renvoi dans le néant. Bonaparte avait fait non seulement guillotiner en 1801 le peintre François Topino-Lebrun, accusé d’avoir comploté contre lui, mais détruire tous ses tableaux afin qu’aucune trace de lui ne demeure sur la terre.

Va-t-on interdire les œuvres de Pasolini ?

De ce pas, pourquoi continuer à vendre les livres de celui que Matzneff revendique comme son maître, Henry de Montherlant (1895-1972), lequel déclarait qu’à 13 ans un garçon atteint le sommet de son développement, et faisait son profit personnel, comme on sait, de cette assertion ? Haro sur André Gide, qui allait en Algérie à la chasse aux « petits Arabes ».
Qu’on lui retire son prix Nobel ! A propos de Gide, l’Etat n’était pas si prude, il y a encore trois ans, puisque le ministre de l’éducation nationale mettait au programme des terminales littéraires « Les Faux-Monnayeurs » roman ouvertement pédérastique. Ce ministre va-t-il offrir sa démission pour une aussi grave atteinte à la moralité de jeunes adolescents ?


En fin, d’autres écrivains, autrement plus pernicieux, dans leur conduite et dans leurs écrits, que Matzneff, ne devraient-ils pas être proscrits et mis au pilon ? Drieu La Rochelle ? Céline ? Mais « Voyage au bout de la nuit » rapportera infiniment plus que le journal de celui qui est lynché aujourd’hui. En 1973, Tony Duvert, écrivain animé d’un génie infernal, recevait le prix Médicis pour « Paysage de fantaisie » un roman qu’aucun éditeur n’oserait publier de nos jours. Les sujets abordés ne seront plus que des sujets moraux, à mettre entre toutes les mains. Et les auteurs devront présenter des papiers en règle. Pasolini fut renvoyé de l’école où il enseignait en Italie, dans le Frioul, et obligé de s’enfuir à Rome parce qu’il avait entraîné des collégiens derrière des buissons. Va-t-on interdire ses livres et ses films ? Le Caravage a peint dans une pose impudique son amant tout nu de 12 ans : le musée de Berlin, pour contenter les familles, va-t-il mettre au rebut « L’Amour victorieux » admiré par des millions de visiteurs ? Que la curée n’épargne aucun chef-d’œuvre !

Il est capital de distinguer l’artiste et l’art. L’homme n’est pas au-dessus des lois, l’art n’est pas de leur ressort. Répugnante est cette période où nous sommes entrés, cette chasse aux sorcières qui permet de ruiner un écrivain ne correspondant plus aux nouveaux critères de respectabilité. Le principe de non-rétroactivité se voit énoncé, en matière civile, par l’article 2 du code civil français. « La loi ne dispose que de l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif. » Il serait bon d’appuyer sur ce pilier du droit contemporain notre regard sur les œuvres du passé.

Dominique Fernandez est écrivain, membre de l’Académie française depuis 2007, lauréat du prix Goncourt en 1982 pour « Dans la main de l’ange » (Grasset, 1982). Son dernier roman, « La Société du mystère », est paru chez Grasset en 2017


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